Premiers contacts avec Freinet
René Daniel
bulletin des Amis de Freinet n°2 1969
pages 2 et 3
 
 
Il est nécessaire de se placer dans la période qui suivit la guerre 1914-1918, de tenir compte de notre état d'âme d'anciens combattants bafoués, prenant conscience que la Guerre est une atroce mystification. De plus, nous vivions dans l'ambiance des "Journées d'Octobre 1917 qui ébranlèrent le monde".
 
Nous sentions un profond désir de nous affranchir et d'affranchir l'enfant de la sujétion.
 
Bien décidés à faire autre chose que ce que nous avions subi, nous cherchions notre vérité, c'est-à-dire notre accord avec nous-mêmes et avec le monde. Cet accord qui nous aiderait à trouver les réponses aux problèmes que nous nous posions et nous guiderait dans notre action d'homme, de citoyen, d'éducateur.
 
Notre état de réflexion nous faisait attentifs, réceptifs. Nous étions donc disponibles. Aussi les écrits de Célestin Freinet, qui nous parvinrent à cette époque, allaient-ils d'emblée nous accrocher.
 
PREMIER CONTACT
C'est la revue syndicale de la Fédération des Syndicats de l'Enseignement (C.G.T.U.) "l'Ecole Émancipée" qui, la première, me permit de connaître les idées de Freinet.
 
École Émancipée du 12 mars 1921.
 
Dans un article intitulé "Pour la Révolution à l'Ecole", Freinet définissait les responsabilités de ses camarades et leur proposait dans l'immédiat: "La vie, l'action et non la théorie".
 
A la question: que sera notre école au lendemain de la Révolution sociale? Freinet répondait:
"Après la libération nous ferons encore à nos enfants des âmes d'esclaves. Et nous qui avons la charge de faire des hommes nouveaux, nous ne saurons produire que des contre-révolutionnaires ou des égarés qui se livreront aussitôt à quelque nouveau Napoléon.
 
Occupons-nous de cette tâche urgente... Il est faux d'arguer qu'on ne peut rien faire avant le renversement de la bourgeoisie...
 
...Je voudrais que tout le monde s'en occupât, même ceux qui ne se sentent pas capables d'être des syndicalistes révolutionnaires. Car si nous sommes souvent inaptes à faire des militants, nous serions nombreux, alors, comme éducateurs révolutionnaires".
 
Dans le numéro du 7 mai 1921, à ceux qui posaient le problème: "comment rattacher l'Ecole à la Vie?" Freinet répondait: ...la question ne devrait pas être posée ainsi car c'est avouer implicitement la faillite de l'Ecole si on est obligé de la "rattacher à la vie".
 
Depuis près d'un demi-siècle, Freinet constatait déjà "la faillite de l'Ecole qu'il faudrait rattacher à la vie. On discute encore sur les possibilités de rattacher l'Ecole à la Vie et pour cela on découvre aujourd'hui, en 1969, un certain nombre de techniques, on les recommande même, mais toutefois avec, trop souvent, la volonté délibérée d'ignorer la pédagogie Freinet.
 
René DANIEL

Amis de Freinet
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