impressions de notre camarade
Suzanne Dubois du Nord
bulletin des Amis de Freinet n°13 p 42 et 43
"Directrice d'école en retraite et mère de famille, j'avais réservé ma soirée de mercredi 20 septembre pour assister au débat "École-Parents" organisé par la télé.
Le programme m'enthousiasmait.

Pour une institutrice de ma génération, Freinet fut le "Phare" qui indiqua et ouvrit la voie vers une école à la mesure de l'enfant, vers une école initiatrice à la culture.

Son attitude courageuse de novateur, inévitablement attaqué par la réaction forçait l'admiration des instituteurs qui, en grand nombre, malgré les conditions matérielles difficiles de l'école, les conditions économiques et politiques de l'époque essayaient de rénover leur "classe" en s'inspirant de l'idéologie de Freinet.

C'est, à la fois pour expliquer à l'ensemble du personnel enseignant, comment Freinet concevait "l'École Moderne" et aussi pour renseigner les parents dont les enfants étaient élèves d'enseignante acquis à l'idéologie Freinet que Le Chanois fit ce très beau et très émouvant film "l'École Buissonnière".

Il était donc heureux qu'en 1972, un débat parents-enseignants fut illustré par "L'École Buissonnière".

Le film fut-il trop long pour les non-enseignants? Je ne puis juger, trop prise personnellement par les souvenirs qu'il m'évoquait, mais le débat trop court fut d'une pauvreté décevante.

Il n'a certes ni passionné les enseignants, ni les parents, qui, aux questions précises qu'ils posaient, attentaient une réponse précise.

Ni le jeune instituteur du Lot et Garonne (qui semblait pourtant être le vrai représentant des enseignants de la nouvelle génération) ni Madame l'Inspectrice à qui s'adressait le commentateur pour "expliquer "Freinet, ni Monsieur le Recteur Gautier n'ont expliqué aux parents que le métier d'instituteur était un vrai métier (et non un sacerdoce!) qu'on devait apprendre (ailleurs que sur le tas) un vrai métier difficile tant l'enfant est la matière à travailler et ce n'est pas seulement "en aimant ces chers petits" qu'on peut faire de la belle ouvrage mais, en les connaissant, on étudiant leurs personnalités intellectuelles et physiques, et surtout leur milieu familial et social.

Puis, avec des moyens matériels suffisants, en essayant de combler "les manques" de stimuler les aspirations avec l'objectif bien déterminé de faire de l'enfant, l'homme socialement heureux qu'il sera demain.

L'Instituteur âgé, de classe unique, est seul, me semble-t-il. intervenu avec bon sens, soulignant les difficultés presqu'insurmontables à l'application des méthodes Freinet dans une classe surchargée, faute de crédits pour acheter matériel et livres de recherches, faute d'un salaire suffisant pour parfaire sa culture personnelle indispensable pour connaître l'enfant, l'éduquer et l'instruire.

A cette soirée, personne n'a trouvé son compte.

Les familles qui, par des expériences personnelles se sont adaptées à la vie moderne, oubliant quel maigre bagage leur a laissé l'école de Jules Ferry, comprenant assez mal le besoin immédiat de renouvellement de l'école: lire, écrire, compter ne suffit plus.

A leurs questions: pourquoi les mathématiques? pourquoi aux mécanismes de l'orthographe substituer l'étude de la langue? les devoirs du soir sont-ils supprimés? pourquoi l'école ne reste-t-elle pas dans "le clos" réservé à l'Enseignement et présente-t-on l'École Buissonnière comme thème de discussion ?

Aucune réponse n'a été donnée.

Certaines interventions auraient-elles été censurées? ou faut il penser qu'un véritable débat aurait dangereusement soulevé des problèmes plus profonds, de la transformation économique de la société qui nécessite la formation de travailleurs instruits et compétents qui prendront de plus en plus conscience de leur rôle déterminant dans la société et voudront y vivre libres, dignes, et heureux tels que l'espérait Freinet à qui, en conclusion de ce débat, on aurait pu rentre l'hommage qui lui est dû.
Suzanne Dubois

(Bien d'accord Suzanne, mais le thème de la discussion était l'École Communale avec support le film de Le Chanois, ceci t'expliquera ce manque de netteté).