IV – LES EVENEMENTS D’ESPAGNE RESSENTIS
PAR LES ENFANTS ESPAGNOLS


Valence

A mon avis, Valence est la plus jolie province de l’Espagne.
Elle a de splendides vergers et jardins.
Au printemps, les orangers fleurissent et en hiver, ils sont chargés de fruits d’or.
Les villages sont inondés d’oranges, les chalets en sont entourés.
Pauvre Valence ! Aujourd’hui la récolte d’orangers n’est pas très gaie, car les bombes sèment la mort.

LUIZ ARANZA


L’ONCLE ET LA TANTE DE PICHI

Hier arrivèrent d’Espagne l’oncle et la tante de Pichi et Gonzalo.
Nous finissions de manger et nous sortions sur la route quand nous vîmes quelques personnes.
Lucien partit appeler papa qui descendit dès aussitôt et les salua.
Gonzalo accourut et se jeta dans les bras de sa tante. Ils pleurèrent tous les deux.
Quant à Pichi, il était très triste et pale d’émotion.


HIER AU SOIR

Hier soir, après dîner, papa nous dit : « Les petits au lit ».
Les grands restent à écouter la radio.
De Salamanque, Queipo de Llano (1) parle. C’est Radio-Mensonge.

  1. Général franquiste

De Barcelone, nous entendons des choses fort intéressantes. Il est dit que, pour gagner la guerre, tous les travailleurs s’uniront.

Deux radios. Deux pensées.

Pedro Moran


TERUEL

Ils l’ont reprise Teruel !
Une fois de plus, ils marchent dans tes rues glorieuses !
Une fois de plus tes maisons s’écroulent sous les bombes criminelles !
Des morts sont tombés pour rien, mais l’héroïque population de Teruel sait aujourd’hui que l’Espagne républicaine c’est l’Espagne glorieuse des travailleurs qui ont un cœur noble.
Honneur à Teruel !

Tous


ESPAGNE

Chaque jour, les fascistes criminels sèment la mort sur les villages et sur le front.
Hommes et femmes se lèvent en demandant secours. Peu nombreux sont les peuples qui les aident.
Pauvre Espagne, si vaillante et généreuse, tu meurs pour sauver le monde des travailleurs.
Ils ne passeront pas !


PAUVRE ESPAGNE

Les fascistes ont juré d’assassiner toute l’Espagne. Mais les vaillants ouvriers républicains ont juré de défendre l’Espagne jusqu’à la mort ;
En Catalogne on livre des combats terribles.
A Lérida, les ouvriers ont lutté avec 4 canons contre 400 aux fascistes .
Combien de sang répandu dans les rues de Lérida. Dans les villes, les enfants, les femmes, les vieillards sont lâchement tués par les bandits sans conscience !
Des armes pour l’Espagne républicaine ! Droit de vivre aux enfants.


BARCELONE

Pauvre Barcelone ! que tu étais jolie ! Maintenant les fascistes te détruisent comme Madrid. Tes maisons sont éventrées par des bombes criminelles.
Dans le ciel apparaissent les oiseaux noirs qui sèment la mort.
Honte aux oiseaux, sans courage et sans honte qui tuent les enfants, les femmes et les vieillards.
Que vienne le jour de la justice !

José Luis


DIONISIO

Dionisio est un enfant évacué de Santander. Sa famille est restée en pays occupé par les fascistes.
Il y a 6 mois qu’il se trouve au Pioulier et il n’a reçu que trois lettres.
Il nous dit souvent : « quand recevrai-je une autre lettre ? ».
Il en reçut une où ses parents lui disaient qu’il leur était impossible d’écrire plus souvent car ils n’avaient pas d’argent pour acheter le papier, l’enveloppe et le timbre.
Cette lettre nous causa, à tous, beaucoup de peine.

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Hier, arriva le père de José-Luis et de Pédro. Ils étaient très impatients à la gare.
Un camarade passa et dit :
« Hé, ton père vient, je l’ai vu » !
José Luis cria « Mon père ! ». Et déjà c’étaient les embrassades ! Sans arrêt José Luis regardait son père en disant :
« Papa, comme tu as maigri ! ».
Ils étaient émus et les larmes coulaient.
Il leur manquait leur mère et leurs frères restés avec le criminel Franco.


LE BOMBARDEMENT

Le premier jour qu’ils vinrent bombarder Santander, chez moi, nous n’entendîmes pas les sirènes.
Il y avait 18 appareils et ils commencèrent à bombarder. C’était un dimanche.
Ma mère nous servait à table, quand elle dit «  Qu’est-ce que c’est que ce bruit ? ».
Mon frère répond :
« Ce sont des avions de bombardement ».
Et aussitôt, ils lâchèrent de nombreuses bombes. Nous nous sauvâmes, les assiettes dansaient ainsi que la maison où nous vivions.

José Luis


TERUEL

Nous avons été très heureux d’apprendre la victoire de Teruel.
Mais cela a coûté beaucoup de vies et de sang.
Les milices avancent mais ne tuent pas la population civile.
Eux, quand ils avancent, ils attrapent tout ce qu’ils voient et tuent sans savoir pourquoi.
Bravo les milices ! Bravo Teruel !
Vive l’Espagne libre.

Tous unis


VICTIMES DU FASCISME

Santander et toute la partie nord, malheureusement, est tombée sous une main noire et criminelle.
Cette main est connue de tout le monde entier. C’est le fascisme qui détruit et tue.
Je suis originaire de Santander. Quand j’étais à Paris, on nous communiqua de très mauvaises nouvelles : Santander était prise par les fascistes.
Tous les enfants pleuraient en disant :
« Criminels ! ».
Mon père m’a écrit et m’a dit que par vengeance des Baléares, ils ont tué à Santander 200 prisonniers de gauche.

José Luis


PICHI

Pichi est un petit enfant de Bilbao.
Pauvre Pichi ! Il a 5ans. Il a été évacué de ce Madrid avec Gonzalo.
L’ »autre jour, je lui demande :
« Comment s’appelle ton père ? »
Il se met à table, la tête entre les mains et me dit aussitôt :
« José Luis, il s’appelle Benimo ISUSI. »
Pauvre petit ! Ensuite, je lui demandais :
«  Et ta mère, »
Il me répondit d’un air triste
«  Elle est morte, José Luis !
« Oh ! oui, beaucoup ».

José Luis MORAN