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- Paul Le Bohec : le libre
Freinétien
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- Portrait vendredi 6 juin 2008
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- À l'image de son dernier ouvrage1, postfacé par
Philippe Meirieu, Paul Le Bohec est un détonateur. Cet
instituteur breton, principal collaborateur de Célestin
Freinet2 dont il a expérimenté et adapté la
méthode3 au-delà du champ classique, prône,
plus que jamais, les vertus des techniques
d'expression-création.
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- Paul Le Bohec en cinq dates
- 1921 : naît à Plourhan (Côtes-d'Armor)
- 1940 : sort de l'École Normale et prend son premier
poste d'instituteur à Gévezé
(Ille-et-Vilaine)
- 1948 : rencontre Célestin Freinet
- 1960 : s'émancipe du « maître » et
prend ses distances avec la pratique Freinet classique
- 1970 : est nommé à l'IUT « carrières
sociales » de l'université de Rennes
- « Il me reste encore treize années de bagarre
». Pour Paul Le Bohec, quatre-vingt-sept étés
en juillet 2008, l'heure de la trêve ne sonnera pas de
sitôt. Quand il évoque la pédagogie,
l'enseignement et les enfants, on mesure l'ardeur de celui que
Célestin Freinet appelait le « phénomène
des phénomènes ». Intemporel, mais tellement
dans son époque, le Breton rebelle, qui d'emblée
interroge « es-tu allée voir mon site internet ?
», aime illustrer ses propos par des maximes de son cru,
exprimant sans relâche la nécessité de «
creuser dans l'humain ». Et quand il ne cite pas Michel
Onfray, Boris Cyrulnik, Gaston Bachelard ou Edgar Morin, c'est sur
les mots de ses anciens élèves de CP-CE1 que Paul Le
Bohec prend appui.
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- La méthode naturelleÉ
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- De son enfance dans les Côtes-d'Armor, ce fils de
cheminot garde le souvenir d'une scolarité «
mortellement ennuyeuse » et d'un enseignement «
répétitif en diable qui ne s'intéressait
qu'à la forme sans jamais faire appel à la
pensée ». Pensionnaire à l'École
Primaire Supérieure de Lamballe pendant quatre ans _tout
comme Pierre, son frère aîné_ Paul est un
élève entêté et chahuteur. Il fait rire
les autres pour oublier l'ennui et surmonter le traumatisme
provoqué par l'éloignement d'avec Robert, le plus
jeune de la fratrie, resté dans la ville natale.
L'École Normale qu'il intègre après la
pension ne l'intéresse pas davantage « sauf vers la
fin, où j'ai pu choisir mes matières ». La
solitude intérieure de Paul prend fin le 1er septembre
1940, à Gévezé, au nord de Rennes, tandis
qu'il revêt la blouse de l'instituteur pour la
première fois de sa vie. Il a alors dix-neuf ans. «
Avec un copain de deux ans mon aîné, nous avons pris
en charge les soixante-douze élèves de cette
école sans directeur. Je me suis occupé des enfants
les plus jeunes4, du mieux que j'ai pu et en explorant une
pédagogie nouvelle basée sur le principe du texte
libre dont l'idée m'avait été inspirée
par une revue ». Cinq années plus tard, il
découvrait l'existence du père de cette
méthode naturelle : Célestin Freinet.
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- É appliquée à toute chose
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- En Ille-et-Vilaine d'abord (Gévezé puis
Orgères), dans les Côtes-du-Nord ensuite (Langourla
puis Trégastel), Paul Le Bohec applique et
expérimente la pédagogie de Célestin
(journal, correspondance) tout en s'intéressant de
près aux travaux d'Elise5 plus axés sur la
création et sur « l'art enfantin ». En 1948, la
rencontre inévitable entre le maître et le disciple a
lieu. De ce premier échange naissent une relation
épistolaire et une collaboration entre les deux hommes qui
ne cesseront de s'intensifier. Pourtant, onze ans après le
début de cette relation et d'une adhésion
fidèle au Mouvement, l'instituteur décide de
modifier sa pédagogie dans sa classe de CP-CE1. Sans rompre
avec Freinet dont il restera toujours très proche, il
décide néanmoins de supprimer le journal,
d'abandonner la correspondance au profit d'une communication
intra-classe6 et d'appliquer la méthode naturelle «
à toute chose : au français oral, au chant, à
la gym, à la science, à la géographie, au
dessin et surtout, aux mathématiques ». Avant de
donner lieu à de nombreux ouvrages pédagogiques7,
les premiers effets de cet affranchissement se mesurent dans la
classe de Paul où les élèves « les plus
encombrés se mettent à avancer d'une manière
étonnante ». Car c'est bien là tout
l'intérêt de son travail : « ouvrir des champs
de liberté aux enfants pour leur permettre l'accès
à la connaissance ».
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- « L'école, réparatrice de destins ?
»
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- En 1970, Paul Le Bohec est coopté par un groupe
d'enseignants de l'IUT de Rennes pour former des animateurs
socioculturels. « Une aubaine » pour ce simple
maître d'école alors libre de développer ses
inventions pédagogiques dans l'enseignement
supérieur. La coformation qu'il mène de front au
sein du réseau Freinet lui permet de se lier avec des
enseignants de Russie, du Brésil, d'Italie, du Canada (É)
et de vivre « des vacances de milliardaire » avec son
épouse Jeannette également institutriceÉ En signant
tout récemment « L'école, réparatrice de
destins ?», Paul Le Bohec se fait l'écho de cette vie
hors de sentiers battus, scandée par soixante années
de pédagogie Freinet. Il y livre des remarques, des
récits et des poèmes cathartiques produits par des
élèves qu'il a su entendre, observer et comprendre.
« Aujourd'hui plus qu'hier, les enfants ont du mal à
vivre leur vie d'enfant. Pour l'avoir expérimenté et
vérifié tout au long de mon parcours d'instituteur,
je ne cesserai de dire que l'enseignement peut permettre à
chacun de se libérer de son mal-être et de se
construire sa propre culture ». Et nous, d'avoir envie de
reprendre les premiers mots de Philippe Meirieu dans sa postface :
« J'aurais vraiment aimé découvrir cet ouvrage
de Paul Le Bohec bien plus tôt ».
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- Marie-Laure Maisonneuve
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- (1) L'école, réparatrice de destins ? (Sur les
pas de la méthode Freinet), L'Harmattan, 2007
- (2) 1896-1966
- (3) Voir le site de l'ICEM (Institut coopératif de
l'École Moderne &endash; Pédagogie Freinet).
- (4) les 6-9 ans, soient les niveaux CP, CE1, CE2
- (5) Freinet, l'épouse de Célestin
- (6) Après plusieurs années d'échanges
inter-classes improductifs, Paul Le Bohec décide de mettre
en place une correspondance écrite entre les
élèves de sa classe.
- (7) « Ah ! vous écrivez ensemble » (Documents
de l'Éducateur, 1983) ; « Les co-biographies dans la
formation » (Documents de l'Éducateur, 1985) ; «
Le texte libre mathématique » (Odilon, mai 1997) ;
« Le texte libreÉ libre » (Odilon, septembre 1997) ;
« Rémy à la conquête du langage
écrit » (Odilon, 1998) et autres travaux aux
Éditions ICEM-Pédagogie Freinet.